Poèmes et dessins de l’auteur.
A propos du livre
Article de Pierre Drachline
paru dans Le Monde du 24 août 1984
Prix Jeune Poésie François Villon en 1978, pour son recueil Cécités (Millas-Martin) Colette Klein s’interdit, dans ses textes, les grands sentiments et les complaisances autobiographiques. Elle suggère simplement que chaque corps véhicule, entre chair et os, des mots qui rougeoient et s’enivrent au contact d’une sensibilité à fleur de plume.
Néante aux mains d’oiseaux que publie aujourd’hui ce poète, met en scène les frayeurs qui l’assaillent quand le vide parvient à prendre possession de la douleur. Il est bien agréable de suivre Colette Klein dans des promenades où la terre se repose contre le ventre des morts. On y apprend à s’éloigner des monstrueux mannequins qui confondent encore la respiration avec la vie.
Extraits
Dépossession exigée
et parvenir dans le non-lieu des choses
jusqu’à l’épuisement de l’esprit
Broussaille sans plus de lumière
Existence partagée en rites quotidiens
Des particules de vie participent à l’extase
*
Des trombes de lumière cimentent
arbres et forêts
En avant des miroirs
Perception
où se cristallisent une abondance de vie
à l’abri des visages
*
Participer au silence des couloirs des tunnels – traversée de la terre dans le sillage d’une destinée encore obscure.
Les chiens qui devaient garder l’Entrée se sont évanouis
Commencement de la cérémonie
Les chiens demeurent couchés
D’ombre en ombre circule la parole
Éclosion de la lumière
dans les lieux extrêmes de la mort
sans violence
sans prière
à l’intérieur de l’immobile
*
Falsifier la mémoire
la tordre l’ensevelir dans des linges et des linges de hasard
Survivre peut-être
Sous la neige demeure une lumière
un charnier de lumière
que font éclater les couteaux de la mort
Anesthésie de l’être
Contre les tempes bruissent des silences
*
L’autre – la nuit l’empêche de rêver
pourtant il a
l’impatience de la mort
Guenilles amassées et qui collent aux âmes
Lui et moi – trahis
Demeurer invisible
Seulement paraître – attendre
Seulement pressentir le moment
où les entrailles révulsées
se mêlent à la terre
entre deux songes insoutenables