Livre accompagné par des encres de Marie Falize
A propos du livre
Article de Jacqueline Brégeault-Tariel
paru dans la revue Poésie-sur-Seine N° 48
Le silence du monde s’étire comme un faire-part de naissance ou de mort sur papier non ébarbé de 10,5 de largeur sur 31,5 de longueur. Ou comme des tombes de marbre incrusté ou la lumière consume les yeux des gisants et les tourne vers l’intérieur. La vie ou son illusion !
Colette Klein sait, en vrai poète, que toute création transfigure la vie. Elle sait retenir l’envers du quotidien là où se terre l’essentiel, les gestes qui demeurent, la torpeur du monde, l’errance des songes, le tremblement de la ville vibrant non pas de lumière, mais de peur.
Elle suppose – et le mythe nous fascine – que sous la mémoire, on pourrait s’infiltrer les souvenirs d’un autre. Les colères et les joies d’un double qui [s’immiscerait] par excès de vie. Poésie / objectivité / fiction, nous sommes au cœur même d’un éternel débat !
Dans ce parcours d’écriture et d’encres où le lecteur est invité à tenir entre ses mains cet objet-livre, la matérialité du vélin participe à cette saisie de lumière matelassée de brume.
Dans la cathédrale à ciel ouvert seuls les oiseaux qui chahutent dans les arbres se permettent d’effeuiller le silence du monde. Très, très beau poème.
Extraits
Si les morts se délabrent c’est pour donner aux vivants l’illusion de la vie.
Un décor de théâtre les renvoie face à face, là où seuls les oiseaux qui chahutent dans les arbres,
se permettent d’effeuiller le silence du monde.
*
Les corps chuchotent et se remplissent de leurs propres reflets, brûlés de l’intérieur par les fourmis de l’hébétude.
La nuit les déchire et les jette en pâture aux songes d’un autre dormeur, qui se débattent entre deux chants, dans l’attente d’un miracle.
*
L’obsession, sous la chair, purifie les condamnés qui savent et qui exultent.
Le consentement détourne de l’effroi.
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C’est la ville qui tremble, avec son port, ses jardins. Elle croit que c’est la lumière qui vibre en elle, alors que réalité, c’est la peur.
Les rues, les arbres, et même les hommes ont oublié de vivre.
*
Et si, sous la mémoire, s’infiltraient les souvenirs d’un autre. Les colères et les joies d’un double qui s’immisce, par excès de vie.
Et si la nuit, dans le crâne, se fragmentait en cailloux de silence.
Le corps qui se creuse, debout, se regarde et renonce à la traversée.