J’ai rencontré Pierre Esperbé le 3 novembre 1978.

En 1985, nous avons publié sous le pseudonyme de ARNE, un livre écrit à quatre mains :”Nuit magnifiée“, grâce à la complicité de notre ami préfacier et éditeur, Jean-Paul MESTAS qui ne révéla jamais l’identité de ces deux auteurs.

 

 

 

Extraits de NUIT MAGNIFIEE

 

 

Ils sont couchés contre le sol visage sur visage

Lumières de nuit s’infiltrent dans leur corps

De plus en plus leurs deux légendes ne formaient qu’une seule présence inondée d’infini de pierreries de nuées d’essences rares et de ciel

Regards nés de la matière mais que traversent les cosmos jusqu’au scintillement

Cercles enchevêtrés dans leurs fibres

Ils s’attendaient dans leurs myriades de miroirs et sans cesse se contemplaient dans un éblouissement d’un milliard de soleils

A la recherche de paroles ils recevaient de l’ailleurs et créaient une nouvelle terre

Dans l’espace délimité par leur amour les arbres serrent entre leurs branches de petites montgolfières qui parfois s’échappent emportant en elles la sève … d’autres ne quittent pas l’abri … refuge de feuilles où le jour se résorbe dans le magma d’une perpétuelle création

Porte ouverte à deux battants par où pénétrer la mouvance bleue dans la torpeur d’un été

Leurs yeux frissonnaient de verrerie

Ils avaient oublié le sens des jours.

 

***

 

Inédits et non mis en forme, voici un exemple de ce que nous avons écrit l’un et l’autre à heure fixe, en communion de pensée :

 

11/08/1996

Arrachement aux marées des âges et tutelles de l’ermite des jours

où va le fil de cette route le long des images qui passent ?

la route ni la forêt ne séparent les aimés de la source du feu

Contraints au silence, ils réapprennent l’univers, le langage des couleurs.

 

 12/08/1996

Libre de désirs de soupirs d’air en légèreté d’une rive océane réelle

Lenteur des minutes quand manque la chaleur des yeux qu’il faut désirer

Des tremblements d’images, au réveil, innocentent la nuit

Les mots dénaturent le souvenir, détournent de la soif et de la prière.

 

13/08/1996

Tenir le silence aux rudesses d’âme en cieux bouchés des jérémiades

s’accrocher aux instants sans vue que les tâtonnements du cerveau en attente

Sous la pluie d’été, revivent les oiseaux, revivent les tendresses, les regards

Tout un monde qui s’offre à la voix du tout dernier prophète

 

 

14/08/1996

Où déposer son cri de l’intime et de rêve dans cette ombre en bordure des éléments

La terre des silences entre dans l’insomnie contre le soleil et ses ondes sans rivages

Ils ont en mémoire la richesse des heures dérobées au vorace

Qui dit la fougue du veilleur à l’écoute des signes 

15/08/1996

Chaque secousse du temps pénètre l’être aux frissons que surmontent les désirs

Le curseur va du point au point sur l’air du néant ou du tout

La ville se repaît de l’attente des hommes, proies ou magiciens

Toute peine dessine un paysage où respirer en dedans, sous la brume

 

16/08/1996

Partir en l’obsession des heures dans les déchirements des arbres en ciel

mais les îles et cette île apaisent alors que le soleil et l’eau s’épanouissent

Des alphabets de lumière servent de refuge à la parole des amants

 

De cercle en cercle, traverser les plaines où décante la folie

 

 

17/08/1996

 

Cette liberté des océans au cœur des îles descend dans les algues et les marais

et l’on entend les nuées cachées et tout rêve éveillé de livres

Ne t’effraie pas, amour, de ma fièvre dévoreuse d’étoiles

L’oubli, toujours, après la honte, guérit des morsures de l’ombre

 

18/08/1996

Une rive parmi d’autres escales et des ibis qui survolent le soir

que peut-il transpirer d’un silence d’espace quand des jeux optent pour l’insu ? L’écho transmet la ferveur jusqu’au rêve intime de l’aimé

 

L’alliance de la terre et de l’océan délivre du chaos

 

 

19/08/1996

Etre mal dans le bien car l’être appelle à d’autres domaines

Fuite des îles au milieu du monde lorsque le rêve entraîne des grands larges

 

Il se peut que l’étreinte dédouble la mémoire, la naissance de l’arbre

 

 

Et même, le désir magnifié dans le partage, l’abandon au silence

 

 

20/08/1996

Par les prés jouxtant les infinis mer et ciel attendent la renaissance

et chaque instant avance un jour au travers des nuées et des lèvres

Les heures se maquillent et sous l’illusion, se perdent, se recréent.Tout un peuple s’épouvante du silence qui ferme les fenêtres

 

 

 

21/08/1996

Etre divisé de semences terrestres ouverture d’infinis ciel au sommet

Voir une clarté vers l’île en retrait d’un rivage imaginé de réel et d’ailleurs

Des empreintes de feu, dans le corps, ordonnent les saisons.
Un souffle, à peine, accompagne les gestes du somnambule..

 

22/08/1996

Attente envers le temps chercheur d’évasion pour des étapes en pieds nus des rivières

et des nuits de ressac sur des vents de sommeils emportés aux marées

Les horloges derrière leur cadran donnent refuge à des débris du temps

Même les statues se souviendront un jour de la ceresse du vent.

    

23/08/1996

Etendues de semences au verso des soleils sur nos tropiques aimantés de désirs

But retour sur cette enclave aux silences des pavés d’ombre

Les navires et les trains, au milieu de l’été, se nourrissent de voyeurs

 

 

 Le livre se referme sur des mots d’impatience qui s’effaceront avant le jour.